L'une de ces reines-guerrières arabes dont
nous avons parlé dans cet article introductif est également une
figure proéminente de l'Antiquité : Septimia Bathzabbai dite
Zénobie (nom latinisé), Impératrice de Palmyre qui se révolta
contre l'Empire Romain d'Aurélien (IIIe siècle après JC).
Bathzabbai Zénobie, une princesse érudite qui campait et chassait avec ses troupes
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Statue du XIXe siècle représentant Zénobie (Bathzabbai) enchainée (par Harriet Hosner) |
De rapides et nombreuses conquètes militaires
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Situation géographique de Palmyre (Palmyra en anglais) |
Odainat et Bathzabbai profitèrent de
la situation fragile en Perse ainsi que celle de Rome (occupée par
les invasions barbares) afin d'étendre leur territoire. Ils
s'attaquèrent d'abord à la Perse usant d'une excuse diplomatique :
l'Empereur Romain Valérien ayant été assassiné par Sapor 1er de
Perse et Odainat avait le statut de gouverneur de l'Empire Romain
Occidental. C'est Bathzabbai qui commanda l'armée menant le siège
contre Sapor tandis que son mari gagna du terrain à l'Ouest. Alors
qu'Odainat fut assassiné par un membre de la famille (son neveu ?
Bathzabbai elle-même?) pour des raisons d'héritage en 267,
Bathzabbai arriva à la tête de Palmyre et décida d'aller encore
plus loin que son mari, lançant une campagne militaire qui permit à
Palmyre d'étendre son territoire jusqu'en Egypte. Elle conquit
également le reste de la Syrie, étendit son territoire jusqu'à la
ville d'Antioche et l'Anatolie Orientale, parfois en menant elle même
son armée, parfois en délégant la tâche à ses généraux. En
quelques années, elle fit passer Palmyre du statut de cité-état à
Empire, faisant également des alliances stratégiques avec les états
voisins. C'est ainsi qu'elle se fit nommer Impératrice de Palmyre et
déclara l'indépendance du territoire de l'Empire Romain Occidental
qu'elle contrôlait déjà de fait et qu'elle nomma Empire de
Palmyre.
Et l'opportunité de défier l'Empire Romain
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En orange, l'Empire de Palmyre sous Bathzabbai/Zénobie |
En déclarant l'indépendance de
l'Empire de Palmyre, Bathzabbai venait de dérober Rome de toute la partie Est de son Empire. Elle se déclara descendante de Cléopâtre dont elle
imita le style de vie opulent et fit frapper des pièces de monnaies
à son effigie. Elle défia Rome en coupant les routes marchandes
servant à amener les récoltes d'Egypte à Rome, ce qui poussa
l'Empereur Aurélien à lancer une offensive militaire. Bathzabbai,
ivre de victoire et de ses conquêtes, était persuadée de conquérir
Rome rapidement et fit même faire un char en or pour son arrivée
triomphale à Rome.
Mais il ne faut pas crier trop vite victoire...
Mais c'est l'orgueil de l'Impératrice
provoqua sa chute et Aurélien repris rapidement l'Egypte et
rencontra Bathzabbai et son armée près d'Ankara. Les écrits
rapportent que Bathzabbai a été vue tout au long de la bataille,
galopant sur son cheval et donnant les ordres à ses généraux.
Aurélien gagna cette bataille stratégiquement en entraînant la
cavalerie palmyrienne vers l'avant puis en l'encerclant. Bathzabbai
retira ses troupes vers Emèse (l'actuelle ville d'Homs). Elle
déclara dans une lettre à Aurélien que l'armée palmyrienne
n'avait souffert que de peu de pertes, car ce sont les garnisons
romaines stationnées à Palmyre dont elle s'était servie en
première ligne pour cette bataille. Néanmoins, Bathzabbai se retira
dans le désert, puis vers la cité de Palmyre pour l'ultime bataille
contre les Romains. Ces batailles furent très coûteuses pour Rome
en hommes comme en temps et en matériel car le terrain n'était pas
à leur avantage, contrairement aux Bédouins et leurs chameaux.
Aurélien fut blessé pendant le premier assaut de la ville et
éprouvait des difficultés à maintenir le siège, bien qu'il ait
amené avec lui ses meilleurs généraux et leurs troupes. Pressé
par les sénateurs de Rome qui lui demandaient pourquoi il avait
tellement de mal à se défaire d'une femme, il demanda à Bathzabbai
de se rendre sur des termes très généreux. Elle lui répondit que
« Cléopâtre préférait la mort à la servitude » et
menaça les Romains de plus belle. Cependant, l'Impératrice, prenant
conscience que la guerre était perdue, tenta de s'enfuir avec son
plus rapide chameau. Elle fut capturée et retournée à Aurélien
qui l'exhiba durant la parade victorieuse de retour à Rome en 273.
Parmi les éléphants, les tigres et autres animaux exotiques,
défilèrent également les captifs, gladiateurs, nobles et guerriers
vaincus. Ces derniers devaient porter une plaque permettant à la
foule de les identifier, mais on épargna à Bathzabbai cette
indignation. De toutes manières, la foule pouvait facilement
reconnaître l'Impératrice marchant avec difficulté à cause du
poids de ses innombrables bijoux en or massif rendant difficile ses
mouvements. Elle était suivie de son fameux char en or sur lequel
elle comptait parader victorieuse, mais vide, ultime moquerie des
Romains. Bathzabbai vécu le reste de sa vie en captivité mais
fastueusement près de la ville actuelle de Tivoli, ayant gagné la
sympathie de sénateurs et organisant des salons qui firent partie
intégrante de la vie culturelle à Rome.
En savoir plus sur Bathzabbai/Zénobie? Voici un entretien de Jacques Charles-Gaffiot, commissaire d'une exposition de 2001 sur Zénobie et auteur de Moi, Zénobie, Reine de Palmyre.
Source: Women Warriors, A History de David E. Jones, 2005.
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